Dessins

Restitution architecturale : la définition du mot donnée par le Littré consiste à « rétablir dans son état premier, original, ce qui a subi des altérations ».

 L’acte de restituer peut également présenter une portée identitaire et répondre à une véritable actualité sociétale.

En 2016, deux projets ont bénéficié d’une importante couverture médiatique : la « restitution » des antiquités de Palmyre et, plus localement, celle de la flèche de la flèche Notre-Dame.

En 1964, la Charte de Venise  reconnaissait l’intérêt de restituer des ouvrages disparus, s’ils étaient correctement documentés, mais préconisait le remplacement des parties manquantes selon « une intégration harmonieuse à l’ensemble, tout en se distinguant des parties originales ».

Les pays les plus touchés par la guerre, comme l’Union soviétique, l’Allemagne et la Pologne, n’acceptèrent pas un document qui niait à ce point les blessures dont ils venaient d’être victimes. Ils souhaitaient pouvoir reconstruire leur territoire, villes et monuments « com’era, dov’era » afin de retrouver leur histoire et leur identité injustement détruits et effacés.

Dans le reste de l’Allemagne de l’est, de nombreux temples avaient été rebâtis parfois avec un petit espace réservé à la mémoire du bâtiment et au rappel des bombardements destructeurs de l’édifice.

 En 1994, le Document de Nara ouvrit une interprétation plus large et plus nuancée de la notion d’authenticité en intégrant notamment la notion d’authenticité de la forme.

 La mémoire des hommes se trouve aussi dans la pierre.

 La pierre gage de longévité des souvenirs, gardienne des pensées.

J’ai vécu 25 ans à Paris, dans un studio. C’était un quartier un peu aseptisé, bourgeois, sans vie, mais devant ma fenêtre il y avait un arbre. Ce platane était le seul coin de verdure de la rue. Je l’ai vu être planté, puis grandir, perdre ses feuillages à l’automne et renaitre au printemps. De manière immuable, saison après saison. Cet arbre devant ma fenêtre a été mon compagnon de vie durant de longues années. Avec le temps, j’ai vu en lui mon alter ego. La peau de son écorce, qui protège un corps irrigué d’une sève. Je l’ai regardé des matins entiers. L’été et l’hiver, je l’ai observé. Je l’ai écouté dans le silence des aubes. Cet arbre est devenu mon ami. Témoin de mes nuits d’insomnie, il était là lorsque j’ai peint ma première toile. L’arbre, fenêtre sur le monde.  Puis un jour, sans prévenir, le gérant des espaces verts de l’immeuble l’a rasé.

L’arbre est mort, ils l’ont tué.

J’ai refermé la fenêtre.

Nous n’entendons plus l’oiseau chanter. L’oiseau sacrifié sur l’autel de la bêtise et de la cruauté des braconniers. Mais aussi par l’usage des insecticides et le réchauffement climatique. Les oiseaux enchanteurs de nos vies disparaissent et c’est tout un monde sonore et signifiant qui s’étiole sous nos oreilles. La disparition du chant des oiseaux fait résonner notre culpabilité. L’homme est désormais privé de formes sonores engendrées par la Nature, il affronte des printemps silencieux.

 L’oiseau s’est tu, l’homme l’a tué.